4.2.3 Variation séculaire


Description du phénomène

Découverte

La variation séculaire est la variation naturelle et relativement lente du champ magnétique de la Terre. On attribue à Henry Gellibrand la découverte de la variation séculaire en 1634. Ce dernier l’a découverte en mesurant la déclinaison ($D$) du champ géomagnétique à Londres sur une période de plusieurs années. Grâce à ces observations, on a conservé des traces de la variation séculaire sur plus de quatre siècles! La Figure 1 montre l’évolution de la déclinaison magnétique à Londres de 1600 à 2000.

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Figure 1. Variation de la déclinaison magnétique à Londres. Source : Ressources naturelles Canada.

On voit sur la Figure 1 que la déclinaison est passée d’environ 10°E à la fin des années 1500, à environ 25°O au début des années 1800, pour ensuite remonter à 3°O de nos jours. Grâce à ces observations et aux modèles de référence du champ magnétique, des chercheurs ont été capable de modéliser les variations dans la déclinaison du champ magnétique partout dans le monde (Figure 2 et Figure 3).

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Figure 2. Variation séculaire globale d’après un modèle théorique rassemblant toutes les données de 1590 à 1990. Source de l’animation : USGS. La source du modèle est indiquée sur l’image.

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Figure 3. Déplacement des pôles Nord géographiques, magnétiques et géomagnétiques (source).

Variation de l’intensité totale

En fait, la variation séculaire inclut toutes les composantes du champ géomagnétique, pas seulement sa déclinaison. Au Canada, on a des données qui décrivent la variation séculaire qui remontent aux années 1800. La Figure 4 montre l’évolution de l’amplitude du champ total ($T$) à Toronto. On voit que de nos jours, l’amplitude du champ se situe à environ 55 000 nT.

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Figure 4. Variation séculaire de l’amplitude du champ total à Toronto pour la période de 1830 à 2000. Source : Ressources naturelles Canada.

Vitesse de déplacement

La Figure 5 montre une accélération de la vitesse de déplacement du pôle Nord magnétique durant les années 1990. L’IGRF projette un ralentissement pour les années à venir.

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Figure 5. Vitesse de déplacement du pôle Nord magnétique en fonction des années. Image par Cavit.


Sources de la variation séculaire

Les études du champ géomagnétique à des endroits bien précis montrent que toutes les composantes du champ magnétique varient sur des échelles de temps allant de quelques millisecondes à des millions d’années [1]. On peut séparer les sources de la variation séculaire en deux parties, selon l’échelle de temps à laquelle elles agissent. De façon générale, trois points sont liées à la variation séculaire observée :

  1. une diminution de l’intensité de la composante dipolaire,
  2. une dérive vers l’ouest de la composante non dipolaire,
  3. d’autres changements dans la composante non dipolaire.

Sources externes

Les sources externes, comme les courants électriques dans l’ionosphère, influencent le champ magnétique de la Terre sur des périodes relativement courtes (en général plus courtes qu’une année). On inclut dans cette catégorie la variation diurne du champ géomagnétique, c’est-à-dire une variation qui est périodique sur une journée. Il faut aussi inclure les évènements plus imprévisibles et qui peuvent se produire sur des périodes de plusieurs jours, comme les tempêtes solaires. Celles-ci sont responsables de l’éjection de plasma à partir de la surface du Soleil qui interragit avec le champ géomagnétique dans la magnétosphère. Pour les applications géophysiques, il faut toujours tenir compte de la variation diurne lors des levés magnétiques. En effet ces variations peuvent atteindre des dizaines ou même centaines de nT à la surface terrestre. On corrigera les données pour la variation diurne selon le même principe que la correction de dérive en gravimétrie.

Sources internes

Les sources internes du champ géomagnétique, comme les mouvements de convection dans le noyau externe, sont responsables de la variation séculaire sur de plus longues périodes (centaines à milliers d’années). On mesure la variation séculaire à partir d’observations directes du champ magnétique à des observatoires situés un peu partout dans le monde. Les observations de la variation séculaire représentent donc celle du champ magnétique observé, et non celle de l’approximation dipolaire. Pour les applications géophysiques, ces variations sont généralement beaucoup trop lentes pour être prises en compte dans la réalisation d’un levé magnétique. On parle d’un taux de dérive lié aux sources internes d’environ 50 nT par année.


Cartes isoporiques 2020–2025

Les cartes isoporiques montrent la variation séculaire annuelle. Elles sont bâties avec le modèle de l’IGRF pour chaque période de 5 ans. Selon la composante du champ qui est montrée sur la carte, les données sont exprimées en degrés ($D$, $I$) ou en nT ($T$, $Z$, $H$) par an. Les cartes présentées dans cette section ont été produites par le British Geological Survey (BGS), qui contribue à l’élaboration de l’IGRF. Vous pouvez peut retrouver les cartes originales sur le site web du BGS.

Déclinaison

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Figure 6. Carte isoporique de la déclinaison du champ géomagnétique.

Inclinaison

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Figure 7. Carte isoporique de l’inclinaison du champ géomagnétique.

Champ total

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Figure 8. Carte isoporique de l’amplitude du champ géomagnétique.

Composante verticale

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Figure 9. Carte isoporique de la composante verticale du champ géomagnétique.

Composante horizontale

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Figure 10. Carte isoporique de la composante horizontale du champ géomagnétique.


Paléomagnétisme

Le paléomagnétisme est l’étude de l’évolution du champ géomagnétique par le biais d’analyse de l’aimantation rémanente laissée dans les roches ignées ferro/ferrimagnétiques lors de leur refroidissement. Ces études reposent sur le fait que le magma, au moment du refroidissement, possède une orientation préférentielle de ses moments magnétiques qui est alignée avec le champ magnétique de la Terre à cet instant. Une fois cristallisée, la roche conserve cette aimantation permanente. Il est donc possible de retracer à long terme la variation séculaire si on connait bien les propriétés physiques des roches et le contexte tectonique à un endroit précis. À l’inverse, si on connait bien les propriétés physiques des roches et la variation séculaire, on peut en déduire le contexte tectonique.


Autres ressources


Références

  1. Blakely, R. J. (1995). « The Geomagnetic Field », dans Potential Theory in Gravity and Magnetic Applications, Cambridge: Cambridge University Press, p. 154–181.

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© 2020–2024 Charles L. Bérubé
Polytechnique Montréal

Dernière modification : 2024-03-15 à 13:30:20.